Курсовая работа: Les moyens linguo-stylistiques de letude du texte
Probablement plus moderne que l'approche précédente, qui, à bien des égards, n'est qu'une transposition dans le plan textuel des hypothèses structuralistes, elle renoue, en profondeur, avec l'antique approche aristotélicienne.
8. Liens de la linguistique textuelle avec la stylistique
Il faut bien préciser le fait que la linguistique est étroitement liée à la stylistique et surtout à la stylistique fonctionnelle.
La stylistique est à la fois une méthode et une pratique, c'est-à-dire une discipline. On en a longtemps gauchi la spécificité, voire contesté même l'existence, en la subordonnant à son objet évident : le style. Or, cette évidence est apparue, à tort ou à raison, de plus en plus opaque ; on a semblé se perdre parmi des définitions contradictoires du style ; on est allé jusqu'à dissoudre la réalité de cet objet; on est ainsi arrivé à une situation bien décevante : un champ de décombres, où l'on ne fait plus de stylistique que par provocation, ou par défaut, ou par substitution. Situation paradoxale après la grande floraison des études de langue ces dernières années ; mais situation, finalement, satisfaisante pour l'esprit routinier comme pour l'innovateur systématique.
Il est cependant dommage de ne pas profiter d'un moment privilégié dans notre époque : celui qui relie l'irremplaçable acquis des recherches classiques et traditionnelles précieux piments des développements actuels les plus modernes. La sagesse consiste donc à partir de la stylistique et non du style. On installe au départ une praxis, et on examine ce qu'on trouve à la fin.
On admet qu'il s'agit d'analyser des faits langagiers. Mais quels faits ? Il est possible d'y voir plus clair en situant la discipline par rapport à d'autres, avec lesquelles elle a partagé le vaste mouvement herméneutique de notre période : la linguistique, la sémiotique et la critique.
La stylistique est partie de la linguistique, entendue au sens de science du langage. Il ne faut pas être dupe de ce terme de science, surtout à cause des connotations de sciences exactes qui lui sont indûment, et comme par atavisme, attachées. Mais on peut appeler science l'investigation systématique et technique du domaine particulier de l'activité humaine qu'est le langage : une telle science, la linguistique, comprend incontestablement des disciplines diverses : phonétique et phonologie, sémantique, lexicologie, syntaxe (pour ne citer que des domaines bien connus)... stylistique. L'objet de chacune de ces disciplines est plus ou moins manifesté, mais on conçoit aisément qu'il s'agit chaque fois d'une aire à délimiter dans le phénomène linguistique. En tout cas, linguistique n'est pas pris au sens d'une théorie linguistique spéciale.
La relation avec la sémiotique permet de préciser les choses. Considérée moins dans la rigueur de la doctrine que dans son esprit et d'un point de vue global, la sémiotique explore la portée significative vers l'extérieur — la significativité — d'un système sémiologique donné : le langage; elle emprunte donc une partie de ses méthodes à d'autres sciences qu'à la linguistique. Il n'empêche que les questions de représentativité, de valeurs significatives, sont au cœur de la problématique stylistique : décrire le fonctionnement d'une métaphore ou l'organisation d'une distribution de phrase, c'est nécessaire ; mais cette opération n'a d'intérêt que si on peut aussi mesurer le degré du marquage langagier repéré en l'occurrence. Et cette mesure, de près ou de loin, est d'ordre sémiotique.
La critique, enfin, est un discours sur le discours littéraire ; elle est aussi la somme des moyens utilisables pour tenir un discours toujours plus éclairant et toujours plus intéressant ; parmi ces moyens, qui vont de l'histoire à l'esthétique, en passant par la grammaire historique, la sociologie, la psychologie et quantité d'autres approches, figure la stylistique, appliquée à la formation concrète du discours étudié. La science de la littérature, qui cerne la littérarité de ces discours, rencontre forcément les déterminations stylistiques des genres et des procédés. La stylistique est ainsi un instrument de la critique (et notamment de la critique d'attribution). Il est peut-être temps de dire clairement de quoi il s'agit ; mais on l'aura justement pressenti dans les lignes qui précèdent. En réalité, il existe plusieurs stylistiques. Et d'abord, d'une certaine façon, il y eut comme une première stylistique dérivée de la phraséologie : c'est en gros la tradition de Ch.Bally. On part du principe que, dans la pratique du langage, on peut isoler des segments de discours, identifier des faits langagiers, et traduire de diverses façons des contenus sémantiques identiques. Par rapport à une sorte de degré zéro d'expression, approchable à l'aide d'un dictionnaire idéologique qui contribue à éclairer les manipulations appliquées à l'ensemble des informations possibles, on délimite un écart dans le discours occurrent. On aboutit ainsi à une stylistique des parlers populaire, familier, affectif, commercial, littéraire... ; mais à une stylistique générale de chaque parler, et non à une stylistique individuelle. On peut même, dans cet esprit, établir des stylistiques comparées, de langue à langue.
Apparemment opposée à cette démarche est la tendance issue des travaux de poétique de R.Jakobson, et parallèle aux études de style de G.Spitzer. On pose d'emblée pour objet un texte reçu comme littéraire, et on essaie d'en scruter le fonctionnement linguistique de manière systématique, de façon à en démonter la spécificité par opposition à d'autres, voisins ou lointains ; on peut aussi étendre la visée à un groupe de textes présentant quelque homogénéité générique. Ces études se différencient des analyses de styles — l'art de juger ou d'écrire — de l'époque classique, en ce qu'elles sont totalement dépourvues de perspectives axiologiques : il s'agit de démontage technique; mais l'objet est en partie le même.
Un domaine négligé, parmi les recherches de ce genre, est celui de la stylistique historique. Cette négligence conduit à enfoncer des portes ouvertes, à dépenser beaucoup d'effort autour, par exemple, de tel emploi d'un démonstratif dans une tragédie de Racine, alors qu'une approche plus large y aurait fait découvrir un simple usage commun à tout un état de langue. Autre conséquence, non moins fâcheuse : le risque de ne plus oser faire de commentaire stylistique sur les textes écrits dans une langue qui n'est plus la nôtre. Il est donc urgent de promouvoir de multiples études synchroniques, comme autant de tranches composant des ensembles articulés sur le devenir historique.
C'est par rapport à ces stylistiques-là que nous proposons ici des éléments de stylistique générale, circonscrits au domaine du français moderne, et orientés vers l'analyse des textes littéraires. Inutile de faire semblant de ne pas savoir ce qu'on cherche : caractériser une manière littéraire à la différence d'une autre, qu'il s'agisse de différence d'auteurs, d'œuvres ou de genres. On pose le postulat suivant : une manière littéraire est le résultat d'une structure langagière. Décrire une structure langagière, c'est démonter les éléments qui la composent, mais auxquels elle ne se réduit pas, et mettre au jour les diverses grilles qui organisent ces éléments. Mais les structures langagières qu'on examine ne sont pas exactement celles de tout acte de langage en situation commune, c'est-à-dire en fonction de communication ou de relation : ce sont celles qui correspondent au régime de littérarité. Les éléments et la grille d'organisation dont la combinaison détermine une manière littéraire donnée sont des faits langagiers envisagés exclusivement par rapport au régime de littérarité. D'autre part, on ne considère que des procédés, des moyens d'expression, des déterminations strictement formelles. Mais aussi, jouant au niveau de la forme de l'expression, le stylistique touche forcément la forme du contenu.
La pratique stylistique ne peut donc être que structurale.
On peut d'abord envisager de quoi est composé le champ stylistique.
9.Texte en cadres de la stylistique.
Toutes ces deux sciences sont unies par le même objet d’étude : LE TEXTE. Qu’est-ce que c’est donc un texte? Une certitude, néanmoins. Il n'y a de stylistique que textuelle, ne serait-ce qu'en raison des faits de macrostructure. Souvent, au cours des développements précédents, on a rencontré le texte, véritable espace livré aux manœuvres stylistiques : celles-ci structurent celui-là, qui conditionne la portée de ces manœuvres. C'est dire que se crée une sorte de consubstantialité entre la discipline d'approche, la stylistique, et son domaine privilégié, la littérature. Evidemment, il faut entendre texte au sens large : depuis l'unité qui se donne elle-même comme telle (scène, chapitre, poème), jusqu'à l'oeuvre complète et même à la série générique. La question de l'unité inférieure ne saurait se régler, éventuellement, que par des procédures d'analyse critique: à l'artifice du découpage à fins purement expérimentales (ou résolument extrascientifiques, comme dans les contrôles de connaissances), ne saurait correspondre que l'artifice de la construction par l'analyste, de manière à monter une pertinence quelconque dans l'élaboration langagière. Justement, le texte est un montage, par un côté ou par l'autre : montage de structures langagières à la production, y compris montage, plus automatique, des modèles généraux d'expression par rapport aux types fondamentaux de discours; montage de grilles à la réception, y compris montage, plus conscient, des procédures de saisie. Il est possible d'appréhender et de justifier un texte, c'est-à-dire la constitution d'une suite discursive en texte, à partir de chacune des articulations de ce double système de montage : quatre niveaux textuels, ou quatre textes. Ces considérations conduisent à consacrer le caractère scripturaire de la littérature : il est certain qu'un art non-langagier relève d'autres systèmes sémiologiques ; mais le problème posé par l'oralité n'est pas celui d'une littérature orale. L'oralité ne saurait entrer en compte que par le biais de la représentation graphique d'une part, et de la traduction stylistico-phonétique d'autre part, des inflexions sonores propres à telle ou telle manière de locution ; elle ne saurait définir une littérarité, constituer une pratique littéraire spécifique, en lieu et place du scripturaire : une littérature orale est une littérature dont on enregistre par écrit la production. La production fixée, ou les divers états fixés de la production transforment la mobilité des multiples possibles, inhérente à différents actes de paroles, en texte. Le stéréotype de répétitions orales sans cesse renouvelées a vocation textuelle ; la marque indélébile d'une unique prestation exclusivement orale, si elle doit être conservée, a vocation textuelle. Il ne faut donc pas confondre support matériel, variable selon les occurrences et les situations, et attribut essentiel du discours littéraire.
Ces remarques ne doivent pas conduire les amateurs à négliger la composante nucléaire du matériau stylistique : le son, objet privilégié des esthètes qui se jouent dans la substance de l'expression. Mais n'oublions pas non plus que le matériau élémentaire lui-même de la mise en œuvre stylistique est le mot, même si l'unité stylistique expérimentale est le texte. Une fois de plus, c'est dans le dynamisme d'une tension que peut positivement se déployer l'activité du praticien de notre discipline.
10. Notion de style.
La notion de style est déterminante pour évaluer la convenance entre l'objet traité et la forme du discours. Le style, composante centrale de l'élocution dans les genres rhétoriques, devint naturellement une composante tout aussi centrale dans les genres poétiques une fois que ceux-ci furent réinterprétés par référence à ceux-là. Il en résulta que l'étude de la forme des genres poétiques ne fut plus seulement l'étude des moyens d'expression (prose contre vers) ou des modes d'imitation (imitation pure ou récit), mais finit par inclure aussi l'étude des niveaux de langue en convenance avec tel ou tel sujet (ainsi la langue de la tragédie ne saurait se confondre avec celle de la comédie) et accorda une place majeure aux éléments ornementaux que sont les figures de rhétorique, pensées comme un élément essentiel du pouvoir de séduction que l'œuvre littéraire doit posséder à l'instar de tout discours (notamment le judiciaire). Cela aura deux conséquences terminologiques et disciplinaires : d'abord, le mot rhétorique finira par se spécialiser pour signifier moins l'art de persuader en général que l'art d'agencer des figures (ce qui, avec le temps, semblera très formel et contribuera à un discrédit provisoire de la rhétorique) ; ensuite, se dessinera peu à peu le champ d'une discipline qu'on appelle la stylistique, laquelle selon l'éclairage retenu, sera
— étude des moyens d'expression (prosodie, métrique, rythme, etc.) ;
— étude des modes d'imitation et, plus généralement, des formes de chaque genre (d'où la notion de stylistique des genres, visant à identifier les invariants structuraux du texte théâtral, du texte romanesque, du texte poétique, etc.) ;
— étude des niveaux de langue ou, plus souvent, de la langue spécifique de tel ou tel auteur (le style de Racine, le style de Chateaubriand, le style de Proust, etc.) ;
— étude des procédés ornementaux, c'est-à-dire des figures (par exemple, l'étude des images dans un texte).
11. Langue et style
On ne reviendra pas ici sur la définition de la langue pour elle-même ; on rappellera qu'elle se présente comme un système grammatical commun, pour une époque donnée, à l'ensemble des locuteurs d'une même communauté linguistique. Face à ce système, comment définir le style ?
Marque de la personnalité d'un locuteur dans le discours qu'il prononce (ou qu'il écrit), le style est souvent caractérisé par ses traits distinctifs : il était au XVIIe siècle ce « je ne sais quoi », difficile à définir mais reconnaissable, qui individualisait toute production.
Cette conception se rencontre encore chez O.Cressot, pour qui le style, relevant de la parole, est « le choix fait par les usagers dans tous les comportements de la langue ». Ainsi, l'usager du français, désirant communiquer un refus, aura le choix entre : Je ne peux pas, je ne puis, je ne saurais, etc.
Ce choix peut être conscient ou ne pas l'être : il constitue cependant un écart entre la langue et la réalisation individuelle qu'est la parole. Ainsi défini il apparaît comme « le choix que tout texte doit opérer parmi un certain nombre de disponibilités contenues dans la langue ». Définir le style consistera donc à dégager les composantes de ce choix. Mais le discours d'un locuteur (d'un écrivain) peut s'accorder plus ou moins au choix conscient de formes grammaticales et syntaxiques : la part peut varier entre l'art qui choisit et la nature qui impose. Pour tenir compte de cela, R.Barthes distingue dans ce que nous avons appelé « style » le style et l'écriture. Langue et style sont, selon Barthes, deux choses qui s'imposent à l'écrivain et dont il n'est pas responsable. La langue est un « objet social » et, comme telle, elle « reste en dehors du rituel des Lettres »; elle est « en dehors de la littérature » .
Le style « est presque au-delà » : « Des images, un débit, un lexique naissent du corps et du passé de l'écrivain et deviennent peu à peu les automatismes mêmes de son art. ». Phénomène d'ordre germinatif, d'origine biologique, le style est «une nécessité qui noue l'humeur de l'écrivain à son langage ».